LES REVENANTS
Henrik Ibsen
Adaptation et réécriture Frédéric Sonntag - Mise en scène Guy Delamotte
Avec Véro Dahuron, Emmanuelle Wion, François Frappier, Timo Torikka et Emmanuel Vérité.
Vidéo Laurent Rojol - Musique Jean-Noël Françoise - Lumières Fabrice Fontal - Régie générale Valentin Pasquet
Photo Tristan Delamotte
dossier du spectacle
C’est l’histoire d’une famille hantée par le fantôme du père. Avec des sujets qui font scandale à l’époque.
La révélation de secrets anciens fait exploser les vivants. Les personnages ne peuvent échapper à la catastrophe.
Véritable tragédie grecque où le destin joue un rôle fondamental, où les révélations funestes surgissent par petites notations successives, par petites phrases laissées en suspens, les revenants semblent nous inviter à vivre avec les fantômes que nous hébergeons bien involontairement et bien souvent inconsciemment.
Notes sur l'adaptation - Frédéric Sonntag
Le travail d’adaptation que j’ai effectué sur Les Revenants d’Ibsen est venu d’un sentiment partagé avec Guy Delamotte, qui m’a commandé ce travail, d’une pièce dont la puissance des enjeux nous semblait masquée par une langue vieillissante. Il nous a donc paru opportun d’axer le travail d’adaptation non pas sur une actualisation des problématiques de la pièce, mais davantage sur un travail sur la langue qui aurait pour effet de nous rapprocher de ces problématiques.
Ce travail, je l’ai accompli en prenant pour point de départ la première traduction française de l’œuvre, celle de M. Prozor publié en 1889. Il s’agissait, ainsi, pour moi de repartir de la version traduite la plus contemporaine de celle en langue originale d’Ibsen et de ne pas avoir déjà comme filtre ceux des différentes traductions plus récentes qui font déjà un premier travail de modernisation ou d’actualisation. Il était ainsi intéressant de constater que cette traduction plus ancienne offrait parfois des passages beaucoup moins littéraires et plus immédiatement parlés que des versions plus récentes (qui compliquent parfois inutilement la compréhension par des traductions trop écrites).
A partir de cette traduction, j’ai opéré un premier travail de coupes et de resserrage de la pièce. Le rythme de la pièce d’Ibsen étend parfois de manière inutile certains passages, certaines scènes, avec pour conséquence de rendre moins lisible certains enjeux. En condensant la pièce, elle a gagné en clarté, en actualité, en puissance. Le second travail a été un choix, dû à nos échanges avec Guy, d’opter pour une langue plus proche de nous, pour un style plus direct, pour un parler plus accessible. Encore une fois non pour actualiser la pièce et la rapprocher de nous, mais davantage pour nous rapprocher d’elle. Avec comme objectif d’obtenir ainsi une certaine intemporalité des situations. La pièce est ainsi moins ancrée dans un contexte folklorique de la Norvège de la fin du XIXème siècle et gagne en universalité.
Tout ce travail a eu pour effet de rendre plus évident les thématiques de la pièce, sa modernité, voire de mettre de nouveau en avant sa dimension extrême et subversive, qui avait fait scandale à l’époque.
Extrait
Si je manque de courage, si j'ai peur, c'est parce qu'il y a en moi tous ces souvenirs qui m'obsèdent, tous ces revenants qui me hantent, me pèsent, et dont je ne parviens pas à me débarrasser. Quand j’ai entendu Osvald et Régine, là, à côté, j'ai eu l'impression de revoir Alving et Jeanne, c'était comme s'ils revenaient ici. Je crois, pasteur Manders, que nous sommes tous des revenants. Et ce n’est pas seulement nos parents qui reviennent à travers nous, ce n’est pas seulement leur héritage, c’est toute une série de vieilles croyances qui reviennent elles aussi. Elles sont là au fond de nous, il est impossible de s'en défaire. Dès que j’ouvre un journal, je vois surgir des fantômes entre les lignes. J’ai l’impression que tout le pays est peuplé de revenants. Et nous, nous avons tous une peur effroyable de la lumière.